Dans cette prison j’étais comme un lion en cage. J’avais une rage terrible en moi. Quand je suis dans cet état là, je me fais peur moi même. C’est comme si la rage se diffuse en vous d’un seul coup, une sorte de puissance infinie et la peur s’installe mais la tue aussitôt.
Un chef maton a essayé de me punir parce que je m’étais trompé d’étage. Je l’ai pris par la manche et je lui ai dit : « ici tu es payé pour me garder, alors tu me raccompagnes à mes appartements et je ne veux pas entendre un mot ». Il est resté stupéfait. Ensuite je lui ai dit: « alors tu t’affoles ? » Il s’est exécuté sans dire un mot. Ce jour là je ne sais pas comment les choses auraient tourné si le maton m’avait résisté (en plus tout le monde l’appelait le « SS »). Bien sûr il savait que j'étais là au secret comme témoin.......
Le jour de ma sortie un maton s’en prenait à un Egyptien qui ne parlait pas un mot de Français. J’ai voulu aider ce gars et je traduisais ce qu’on lui demandait. Le maton a explosé et m’a demandé de me taire. Puis il lui a demandé d’épeler son nom. Cette fois c’est moi qui ai explosé. J’ai dit au maton : « vous êtes encore plus con que tous les autres, vous ne voyez pas qu’il n’écrit pas comme nous ce gars ? Lui il écrit en arabe». J’étais tout près de la porte de sortie et je me suis retrouvé en cage. Ca m’a soulagé de lui dire ce que je pensais et je savais que de toute façon, je devais être dehors avant minuit. C’est la loi ! Ma famille m’attendait dehors. Un gars ( un serbe) a expliqué à Josiane ce qui s’était passé et que j’allais sortir bientôt. Elle a tout de suite compris que c’était vrai et elle m’a attendu. Je suis sorti à 22h00 et encore seul ! Ce qu’il faut savoir c’est que j’ai dû payer une caution pour sortir et on ne me l’a jamais remboursée. Une fois de plus j’ai payé pour être libre !
Le lendemain j’ai pris ma voiture et je suis allé chez Pascal : 600km. Je voulais tout savoir et surtout pourquoi lui était libre et pourquoi moi j’avais été en prison pendant un mois. Quand je fais une connerie, je l’assume, et je vais jusqu’au bout de ma connerie mais il est hors de question de payer pour les autres. Lui qui se vantait sans cesse d’être un homme avec un grand « H », et bien ce jour là, je l’ai laissé comme une serpillière. Je suis rentré à la maison soulagé d'avoir réglé mes comptes avec lui.
La vie a repris ses droits et une fois de plus, ce mystère de la Pentecôte était incompréhensible. J’étais de plus en plus renfermé par rapport à la société. J’ai repris le travail et ma seule ambition c’était ma famille et rien d’autre. Rien ne pouvait m’arrêter. Je me disais que le jour où je ne pourrais plus avancer c’est parce que je serais au cimetière.
Cinq mois après ma sortie de prison, j’ai appris que Nathalie, ma fille, était enceinte. Cela faisait 5 mois qu’elle nous le cachait. Avec son copain, ils avaient fait ça le jour de la Pentecôte, le jour où je m’étais retrouvé en prison. Une continuité !
En deux jours je lui ai trouvé un billet pour l’Angleterre car là bas l’IVG est tolérée jusqu'à 6 mois. J’ai posé le problème clairement à ma fille. Je lui ai dit que c’était à elle de décider mais que je ne voulais plus voir son copain. Je ne supportais pas ce gars qui ne se conduisait pas comme un homme. On peut me critiquer d’avoir été un voyou mais je suis fier de cette mentalité qu’ont les voyous : un code d’honneur à respecter, être des hommes avant tout.