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Au terme
d’une période d’observation le juge m’a informé qu’il avait l’intention de me
placer dans un foyer de semi liberté jusqu'à ma majorité, ou mon départ à
l’armée. En fait ma seule liberté c’était d’aller travailler. Je ne pouvais pas
accepter cela. Impossible d’imaginer de m’engager à l’armée et ma majorité était
seulement trois ans plus tard. Un copain qui était passé par là avant moi m’a
dit ceci : « évade toi, cherche du travail, une chambre et ensuite va voir le
juge et mets lui le marché en main ». La deuxième solution c’était de m’évader
et de refaire des conneries. Si je me faisais prendre j’étais jugé incurable et
la justice se débarrasserait de moi espérant que je recommence encore. Le choix
fût vite fait car il s’agissait de ma liberté. J'ai pris ma décision et
j'ai laissé la vie faire le reste.
Le jour de la Pentecôte ma
mère devait venir me chercher en permission. Elle n’est pas venue. J’ai donc
décidé de faire la belle avec deux autres copains. Contrairement aux autres nous
ne sommes pas partis en direction de Paris mais en sens inverse. Le but étant de
rejoindre Paris mais en faisant un large détour. Notre erreur fût de voler une
voiture qui avait le pot d’échappement crevé .Des motard nous ont arrêté tout
près du but. On leur a dit qu’on venait de s’échapper de cette maison de
correction. Nous avons été conduit chez le juge et cette fois j’étais majeur
pénal (plus de 18 ans). On m’a placé en prison en attendant le jugement. J’ai été condamné à 10
mois de prison. Ma mère est réapparue et cette fois je l’ai jeté comme une mal
propre. Pour se faire pardonner elle m’a payé un avocat et je suis sorti au bout
de trois mois avec 1 an de sursis et 3 ans de mise à l’épreuve. Mais aussi
bizarre que ce fut je ne lui ai jamais
pardonné......... Dans cette prison j'ai retrouvé un clan de gitans. Ils m'ont
appris à survivre avec rien. J'ai retrouvé aussi un copain avec qui je faisais
les 400 coups. Malgré tout je n'étais pas seul. J'étais dans un quartier pour
mineurs (J3). Le chef des gardiens était un vrai SS. Il portait un corset car un
gars l'avait passé par dessus le parapet. Il détestait les J3 car une légende
disait que sa femme était partie avec un J3, donc il se vengeait sur nous. Le
dernier jour quand j'ai été libéré c'est lui qui m'a accompagné jusqu'à la
porte. il me faisait la morale tout le long du chemin. Je lui ai dit : garde ton
baratin moi j'en ai rien a foutre. La tradition voulait que le sortant traine
son paquetage jusqu'à la sortie , mais peu allaient jusqu'au bout. Moi je l'ai
fait et quand ce maton m'a dit de le porter je lui ai dit: porte le si tu veux
moi il en est pas question. Avant de sortir il m'a dit: toi si tu reviens ici je
te massacre. et je lui ai répondu: tu peux toujours rêver.
Je venais également de découvrir que la Pentecôte
jouait un grand rôle dans le karma de la vie et également les vendredi 13.
J’avais
gagné ! Cela m’a coûté 3 mois de ma vie pour être libre ! Le problème c’est que
j’ai refusé cette mise à l’épreuve que l’on m’a imposée en gage de bonne
conduite. L’éducateur m’a envoyé 10 convocations et j’ai toujours fait le sourd.
Pourtant je savais que je risquais la révocation du sursis. Jusqu’au jour où
c’est lui qui s’est déplacé chez moi et m’a proposé un compromis : je devais lui
téléphoner chaque fin de mois pour qu’il fasse son rapport. J’ai accepté. Un
homme sympa qui faisait ça bénévolement. Je n'ai jamais voulu le trahir.
J’avais la
rage contre cette société et ma solution fût de me renfermer sur moi même.
J’étais un rebelle et je suis devenu une tête brûlée, une sorte de marginal à ma
façon. Si j’osais, je dirais même que j’étais devenu un anarchiste et je le suis
resté toute ma vie. Anarchiste dans le sens où je réfutais toujours l’ordre
établi. Je refusais cette société où j’étais obligé de vivre. J'étais dans
un monde que je refusais. Les juges , les éducateurs, les psy et tout le système
qui va avec eux avaient fait de moi un homme qui aurait pu devenir un gangster.
C'était limite.
Un beau
jour, j’ai revu Josiane et nous sommes sortis ensemble. Toujours pour défier ses
copains mais le piège s’est vite refermé sur moi. Certains appellent ça le
destin ! Des filles j’en avais plus que je n’en voulais mais c’est elle que j’ai
choisi. Elle est devenue ma femme. Elle était d’origine italienne et plutôt
fougueuse. Ce n’était pas la plus belle mais j’aimais ses jambes et sa gaieté.
Un jour de
Pentecôte, en 1967, nous avons loué une chambre d’hôtel (la n°7). C’est ce jour là que
nous avons conçu notre fille Nathalie. Le plus dur fût d’annoncer la nouvelle à
sa famille. On s’est marié 3 mois plus tard le 2 Septembre 1967. Chez Josiane
tout est dans les 7.
Au moment
du mariage, un problème fondamental s’est présenté : passer à l’église. Je
n’avais aucun doute quant à l’existence de Dieu, mais l’église et les curés, il
ne fallait surtout pas m’en parler. Plus jeune un curé m’avait enlevé toute
espérance. Le jour où je suis allé le voir pour faire ma communion, il m’a dit
« retourne chez toi et la prochaine fois reviens avec l’argent du livre, ensuite
on verra ce qu’on peut faire pour toi ». Je ne suis jamais revenu : j’étais trop
écœuré.